Philippe Ruvunangiza, Directeur général du Bureau d’Etudes Scientifiques et Techniques (BEST) en RDC, a reçu ce mercredi 30 octobre 2024 à New-York, le prestigieux Prix du Courage Civil. Ce prix, décerné par l’organisation internationale Civil Courage Prize, met en lumière les efforts courageux de ceux qui, souvent au péril de leur vie, luttent pour la justice et la dignité humaine.
A l’occasion d’une cérémonie solennelle, Philippe Ruvunangiza a captivé son auditoire en dénonçant avec force les injustices perpétrées en RDC et en rappelant son engagement indéfectible pour la paix et le respect des droits humains. Il dédie ce prix aux communautés de Mwenga, victimes d’exploitation minière illégale, et s’engage à les soutenir.
«Ce courage, je le partage avec des nombreuses personnes et institutions qui m’ont soutenu depuis des longues années. Je pense spécialement à ma famille, à mes collègues de travail et à tous les défenseurs des droits humains dans le monde. Je pense en particulier aux populations de Kitutu en Territoire de Mwenga au Sud-Kivu en proie à des pratiques d’esclavage moderne ; je leur dédie ce prix dont le montant servira à soutenir les activités de l’association de victimes qu’elles ont mis en place pour défendre leurs droits,» a-t-il indiqué.
Un portrait sombre de la RDC
Lors de son discours de réception, devant un parterre de personnalités influentes, Philippe Ruvunangiza a dressé un tableau poignant des crises auxquelles fait face son pays depuis des décennies. « Plus de dix millions d’êtres humains tués, près de huit millions de personnes déplacées », a-t-il déclaré, rappelant que les violations des droits humains en RDC sont d’une ampleur comparable aux crimes contre l’humanité, voire au génocide.
Il a souligné le rôle actif de certains États voisins, tels que le Rwanda et l’Ouganda, dans cette violence sans fin, mais aussi l’implication tacite de la communauté internationale, attirée par les richesses minières de la région.
Ce qui fait écho dans le discours de Philippe Ruvunangiza, c’est l’idée que cette indifférence face aux souffrances congolaises est à la fois déchirante et condamnable. Il a pointé du doigt les entreprises étrangères qui, pour leur profit, exploitent les ressources minières congolaises en négligeant les droits de l’homme et les normes environnementales.
« J’ai réalisé que toutes ces horreurs avaient été perpétrées par cupidité pour les ressources minérales naturelles de mon pays. J’ai décidé de concentrer mes efforts sur l’amélioration de la gouvernance de ces ressources et ainsi contribuer à la création d’une société plus juste et plus humaine. L’esclavage est de retour dans les mines artisanales d’or, de cuivre et de cobalt, principalement détenues par des opérateurs étrangers en collusion avec des éléments incontrôlés des forces de sécurité », a-t-il martelé.
L’urgence de mettre fin aux souffrances humaines
Philippe Ruvunangiza a également évoqué la destruction continue du bassin du Congo, surnommé le « deuxième poumon de la planète », due à la déforestation et à l’exploitation illégale des ressources naturelles.
Selon lui, abandonner la RDC et ses habitants à leur sort reviendrait à compromettre la survie de l’humanité. Il appelle ainsi la communauté internationale à « emprunter ensemble le chemin de la responsabilité, de l’intelligence collective et de la conscience stratégique ».
Parmi ses préoccupations figure aussi le Parc des Virunga, sanctuaire pour les gorilles des montagnes et classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, aujourd’hui menacé par les conflits armés et l’exploitation illégale des ressources. Ruvunangiza insiste : la paix en RDC est essentielle non seulement pour les Congolais mais pour l’équilibre écologique et la sécurité mondiale.
Un plaidoyer pour une pression internationale
Pour Philippe Ruvunangiza, la clé pour mettre fin à cette violence se trouve aux États-Unis. En appelant les entreprises américaines et leurs dirigeants à choisir un approvisionnement éthique en minéraux congolais, il fait écho aux campagnes contre l’apartheid en Afrique du Sud et les diamants de sang en Angola.
Celui-ci croit que l’engagement du secteur privé et la pression des citoyens américains sur leurs dirigeants peuvent transformer la situation en RDC.
Le Directeur général de BEST a laissé un message d’espoir et d’encouragement à tous ceux qui, comme lui, croient en un monde de paix et de coopération. Inspiré par les mots de Martin Luther King, il rêve d’un monde où la Déclaration universelle des droits de l’homme sera un idéal commun pour tous.
Philippe Ruvunangiza est un activiste et professionnel de Bukavu, qui demande courageusement des comptes aux sociétés minières et au gouvernement envers les communautés affectées par l’extraction minière dans l’est du Congo. Il est actuellement directeur du Bureau d’Etudes Scientifiques et Techniques (BEST). BEST est une organisation à but non lucratif et un organisme de recherche. Ruvunangiza suit l’expansion de l’exploitation minière dans la région du Kivu et l’exploitation subséquente des communautés dans les zones minières. Au sein de BEST, il coordonne la production de rapports qui révèlent et documentent les preuves des abus commis par les États, les entreprises et les acteurs locaux contre les mineurs et l’environnement.