Un rapport du Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL) lève le voile sur des scandales financiers au sein du Parlement congolais, mettant en cause les présidents de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso et du Sénat, Modeste Bahati. Fraudes, détournements et dépassements budgétaires massifs entachent la gestion des deux chambres, plongeant le pays dans une crise institutionnelle.
Des pratiques douteuses dans la gestion financière au Parlement congolais viennent d’être mises en lumière par un rapport accablant du Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL). Intitulé « Le Biface du Parlement congolais : Un contrôleur à contrôler », le document lève le voile sur des scandales impliquant les deux chambres parlementaires, l’Assemblée nationale présidée par Christophe Mboso et le Sénat dirigé par Modeste Bahati.
Un Parlement budgétivore
Entre 2021 et 2023, l’Assemblée nationale et le Sénat ont dépensé un total de 1,1 milliard de dollars, soit environ 60% du budget pour l’Assemblée nationale et 40% pour le Sénat. Ces dépenses faramineuses, réalisées sans respecter les procédures comptables et les règles de passation des marchés publics, mettent en lumière un mode de gestion chaotique.
Selon le CREFDL, les fonds ont été détournés ou dilapidés par des dépassements budgétaires flagrants, notamment pour l’achat de véhicules. À l’Assemblée nationale, dirigée par Christophe Mboso, 90,2 millions de dollars ont été dépensés pour l’acquisition de véhicules terrestres alors que la prévision initiale était de seulement 4,5 millions de dollars, soit un dépassement de 1 999,85 %. En réalité, seuls 12 bus et 14 minibus ont été acquis pour le personnel administratif et les directeurs de service.
Cette inflation des coûts s’est déroulée dans un climat d’opacité totale. Aucune information sur les marchés publics n’a été publiée, violant ainsi les articles 13 et 34 de la loi relative aux marchés publics. Le dernier Plan de Passation des Marchés Publics (PPM) de l’Assemblée nationale date de 2020.
Au Sénat, sous la présidence de Modeste Bahati, la situation est tout aussi préoccupante. Les sénateurs ont dépensé 881 millions de francs congolais (422 893 dollars) pour l’achat de véhicules sans fournir la moindre justification.
Bâtiments fantômes et personnel pléthorique
Un montant de 4,1 millions de dollars avait été prévu pour la construction de deux bâtiments destinés aux commissions permanentes et à certains services de l’Assemblée nationale. Mais malgré le décaissement des fonds par le Trésor public, les commissions sont toujours locataires. Une maison aurait été achetée au quartier Beau-vent dans la commune de Lingwala, mais l’adresse exacte et le montant restent secrets.
Pour le Sénat, le projet de construction d’un dépôt d’archives a également suscité des interrogations. Un écart inexpliqué de 18 723,6 dollars dans le coût de construction fait planer le doute sur la gestion de ces fonds.
En plus de ces dépenses suspectes, les deux chambres ont gonflé leur personnel de manière démesurée. À l’Assemblée nationale, l’administration compte 612 personnes, tandis que les cabinets politiques en comptent 2 756. Au Sénat, 881 personnes travaillent dans les cabinets politiques contre 259 au Secrétariat général. Les membres des bureaux des deux chambres bénéficient d’une double rémunération : en tant que députés ou sénateurs, puis comme membres du bureau.
Christophe Mboso, président de l’Assemblée nationale, est pointé du doigt pour sa mauvaise gestion. À 81 ans, sa présidence est marquée par des scandales et une guerre interne contre Vital Kamerhe, désigné candidat de la majorité pour lui succéder. En bloquant l’organisation de l’élection du bureau définitif, Mboso empêche également la confirmation du gouvernement dirigé par la Première ministre Judith Suminwa Tuluka, désignée par le président Félix Tshisekedi.
Recommandations du CREFDL
Le CREFDL appelle l’Inspection Générale des Finances (IGF) et la Cour des Comptes à diligenter un contrôle au Parlement et à effectuer un audit approfondi des crédits payés depuis 2021. La justice est également invitée à se saisir d’office des rapports de reddition des comptes 2021-2023 du ministère du Budget et à entamer des enquêtes judiciaires pour établir les responsabilités.
Dans un pays où la corruption et la mauvaise gestion entravent le développement, les Congolais espèrent que ces révélations aboutiront enfin à des actions concrètes pour restaurer la confiance envers leurs institutions et garantir la transparence dans la gestion des fonds publics.