À l’occasion de la journée internationale de la lutte pour la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes, l’organisation Partenariat pour la Protection Intégrée (PPI) vient de présenter un rapport sur la situation de la liberté de la presse à l’Est de la République démocratique du Congo.
Dans ce rapport, l’organisation révèle que du 1er août au 31 octobre 2024, elle a documenté 14 cas de violations et d’abus contre les journalistes et les médias dans 4 provinces de l’Est du pays. Il s’agit de la province du Nord-Kivu où il a été enregistré 9 cas, de la province du Sud-Kivu avec 4 cas, de l’Ituri avec 1 cas et de la province du Tanganyika.
L’organisation indique que pour le Tanganyika, aucun cas n’a été enregistré mais les journalistes de cette province font face à la criminalité urbaine ou à l’insécurité généralisée comme dans toutes les autres provinces de l’Est.
Des journalistes ciblés par l’insécurité généralisée
De ces cas, PPI indique que 7 sont directement liés au travail des journalistes, tandis que 7 autres ont été commis contre les journalistes dans des circonstances moins claires, pointant l’insécurité généralisée et le ciblage à la fois.
« Entre août et octobre 2024, l’Est a connu l’assassinat de deux journalistes. Il s’agit de Monsieur Ghislain Kasonia, journaliste à Radio Upendo Kivu, dont le corps sans vie a été retrouvé au stade Maurice de Furu, à Butembo le 4 août. Les circonstances de sa mort n’ont toujours pas été élucidées », regrette l’organisation.
Lors de la conférence de presse animée à Bukavu ce samedi 2 novembre 2024, le directeur des programmes de PPI est également revenu sur l’assassinat de Monsieur Edmond Bahati, coordonnateur de la Radio Maria de Goma, qui a été assassiné le 27 septembre par des hommes armés en tenue civile sur l’avenue Lusuli, dans le quartier Ndosho, alors qu’il rentrait chez lui.
Jonathan Magoma, directeur des programmes de PPI, a réaffirmé la demande de l’organisation invitant les autorités congolaises à mener des enquêtes pour expliquer au monde les circonstances dans lesquelles ces journalistes ont été tués.
« Comme vous le savez, quelques trois jours plus tard, ses bourreaux ont été arrêtés mais jusqu’à présent, le dossier n’a pas toujours été fixé en justice! PPI est en contact avec la famille de la victime afin de l’accompagner en justice. En juillet 2024, nous avons tous été surpris par la disparition du journaliste caricaturiste Yves Kayene, retrouvé mort abandonné dans sa chambre au Rwanda. Les circonstances de sa mort n’ont jamais été élucidées malheureusement, et cela, malgré l’appel de PPI demandant au Gouvernement congolais de bien vouloir s’impliquer! PPI poursuit ses efforts afin que des enquêtes soient menées. Ce 2 novembre donc, PPI insiste et persiste sur sa demande invitant les autorités congolaises à mener des enquêtes pour expliquer au monde les circonstances dans lesquelles ces journalistes ont été tués et les invite, une fois de plus, à lutter contre tous les crimes commis contre les professionnels des médias sur toute l’étendue du territoire national », a soutenu Jonathan Magoma.
Des agents étatiques et groupes armés parmi les auteurs des abus
Il a rappelé qu’à l’Est, des journalistes ont été assassinés par le passé et jusqu’à présent aucune justice n’a été rendue en leur faveur. Revenant sur les auteurs de ces abus et violations contre les professionnels des médias, le rapport de PPI indexe au premier rang les agents étatiques (PNC, FARDC, DGM, ANR, les parquets, etc.) qui, sur un total de 61 cas documentés depuis le début de cette année, ont été impliqués à 69 %. Les auteurs, en deuxième position, sont les groupes armés et les rebelles. Après eux, des inconnus, des fanatiques des partis politiques et ceux des clubs de sport.
Les formes d’atteintes couramment documentées sont généralement les menaces, les agressions, les attaques nocturnes, les arrestations arbitraires, les assassinats, les enlèvements, les tortures, les cambriolages et pillages des médias, et les pressions fiscales et autres.
Lors de cette conférence, PPI est également revenu sur les exactions en train d’être commises par les Wazalendo contre les citoyens, journalistes et défenseurs des droits de l’homme.
« Présentement, deux journalistes de la radio Top Buzi FM dans le territoire de Kalehe sont sous hautes menaces de ces Wazalendo. L’un d’eux a échappé à la mort il y a une semaine, tandis que l’autre est menacé de mort chaque jour », a révélé l’organisation. L’organisation a invité le Gouvernement à rappeler à l’ordre ses différents services et à tout mettre en œuvre pour protéger les journalistes et mettre fin à l’impunité des crimes commis contre eux.
PPI a invité tous les acteurs du secteur médiatique ou d’appui à la promotion de la liberté de la presse de bien vouloir intervenir maintenant, vu les conditions et l’environnement dans lesquels exercent les journalistes en RDC et spécialement à l’Est du pays, déchiré par des conflits. Par la même occasion, l’organisation a remercié Internews et la Coopération Suisse pour leur appui et accompagnement, qui lui permettent d’apporter de l’assistance aux journalistes dans l’Est du pays.